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- Le CSLF recommande de redynamiser la politique linguistique du Québec
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- Entrevue avec Jennifer Dion (J.D.), agente de recherche au Conseil supérieur de la langue française (CSLF)
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Le CSLF recommande de redynamiser la politique linguistique du Québec
Dans la foulée des travaux menés par le gouvernement du Québec pour proposer une nouvelle Charte de la langue française, le Conseil supérieur de la langue française (CSLF) a entrepris de revisiter lui aussi l’esprit de cette loi. Dans un avis produit à l’intention de la ministre responsable de la Charte de la langue française, madame Diane De Courcy, le CSLF émet une série de recommandations ayant comme objectif de redynamiser la politique linguistique du Québec afin que le français soit et demeure la langue commune des Québécois.
Précisons que le CSLF y présente une vision globale qui touche non seulement la Charte de la langue française, mais la politique linguistique dans son ensemble, soit toutes les mesures servant à baliser l’usage des langues dans l’espace public au Québec. Le CSLF suggère trois grandes orientations, tant pour la conception que pour la mise en œuvre de la politique linguistique, soit :
- renforcer la cohésion sociale de la collectivité québécoise autour du français, langue commune;
- réaffirmer la place centrale du français au cœur de nos ambitions collectives;
- responsabiliser les institutions, les entreprises et les citoyens.
En s’inspirant de ces grandes orientations, le CSLF formule un certain nombre de recommandations qui visent quatre domaines prioritaires d’action.
Le français, langue du travail
Le CSLF juge que la tendance des dernières années ne va pas dans le sens de l’objectif recherché, qui est de faire du français la langue normale et habituelle du travail de l’ensemble des Québécois. Selon les données d’enquête disponibles, la place du français dans le monde du travail aurait globalement augmenté entre 1971 et 1989, puis reculé entre 1989 et 2010, tant à l’échelle du Québec que dans la région métropolitaine de recensement (RMR) et l’île de Montréal. La diminution de l’usage du français se fait, le plus souvent, au profit d’une augmentation du bilinguisme français-anglais, à des degrés divers, ou, parfois, d’un usage plus général de l’anglais. Cette tendance, perceptible particulièrement dans les entreprises du secteur privé, grandes et petites, ne peut être attribuée uniquement à l’augmentation des communications avec des interlocuteurs de l’extérieur du Québec, puisqu’elle touche également certaines communications avec l’entourage immédiat des travailleurs (avec leurs collègues et leurs subordonnés). Il est clair que le marché du travail a évolué au cours des dernières décennies et que la connaissance d’une autre langue que le français, généralement l’anglais, est devenue une exigence incontournable pour un grand nombre de postes dans plusieurs secteurs d’activité. Cependant, le CSLF est d’avis que le bilinguisme ne peut ni ne doit devenir une exigence systématique dans le monde du travail au Québec, lequel a un rôle primordial à jouer dans l’intégration socioéconomique et linguistique des néo-Québécois dans une société majoritairement francophone.
Puisque certains phénomènes tels que la mondialisation des marchés et la pénétration des nouvelles technologies de l’information exercent de la pression sur le français dans le monde du travail, on peut remettre en question le fait que des pans importants des milieux de travail ne soient pas visés par des efforts de francisation. À la lumière de ce constat, le CSLF recommande notamment que les entreprises qui emploient de 25 à 49 personnes soient soumises à une démarche de francisation obligatoire, sous la responsabilité de l’Office québécois de la langue française (OQLF), selon une formule allégée et souple.
L’importance de la francisation du monde du travail
Que le français soit la langue normale et habituelle du travail est l’un des objectifs les plus importants et structurants de la politique linguistique au Québec, notamment parce que c’est une des conditions d’accès au marché du travail pour la majorité des Québécois et que les milieux de travail constituent des lieux d’intégration socioéconomique et linguistique de premier plan pour les immigrants. De plus, l’usage du français au travail contribue directement à faire du français la langue commune de tous les Québécois, francophones, allophones et anglophones. Bien que la mondialisation des marchés et le réseautage des entreprises à l’échelle internationale imposent parfois l’usage d’une autre langue que le français au travail, cela n’est pas incompatible avec une démarche de francisation qui apporte, par ailleurs, de nombreuses retombées positives. En effet, en adoptant le français, une entreprise se donne accès à une main-d’œuvre plus nombreuse et facilite ses communications avec les fournisseurs et les clients québécois. De plus, elle favorise les échanges entre ses employés de langue maternelle différente, encourageant ainsi le travail d’équipe. Notons qu’un milieu de travail où le droit de travailler en français est respecté a des effets positifs sur la productivité des employés, sur leur bien-être et sur leur sécurité. La francisation d’une entreprise permet aussi de faire en sorte que le droit des clients qui désirent être informés et servis en français soit respecté, ce qui accroît leur satisfaction. Plus largement, une démarche de francisation témoigne d’un engagement social envers la langue française.
La francisation des immigrants et leur insertion sociale dans les réseaux francophones de travail et de la société civile
Également, le CSLF réitère l’importance de faire plus en matière de francisation des immigrants, notamment ceux qui possèdent une formation professionnelle. Rappelons que la connaissance du français qu’ont un grand nombre de ces nouveaux arrivants résulte souvent d’une francisation de base qui leur permet de se débrouiller dans la vie quotidienne. Bien que des efforts soient déjà investis afin de leur donner des connaissances plus grandes liées à leur domaine de formation, le CSLF croit qu’il faut favoriser l’apprentissage du français à des niveaux de compétence plus avancés et développer davantage de cours de francisation qualifiante centrés sur la maîtrise du vocabulaire spécialisé du domaine de formation des immigrants sélectionnés.
La maîtrise du français par tous les Québécois
Le CSLF l’a mentionné dans ses avis précédents et il le réitère fortement aujourd’hui : hausser le niveau de maîtrise de la langue française de l’ensemble des Québécois doit demeurer une priorité. Entre autres, il apparaît fondamental que tous les élèves qui obtiennent un diplôme collégial, que ce soit dans le réseau francophone ou anglophone, aient acquis une maîtrise du français qui soit adéquate.
L’exemplarité et le rôle moteur de l’Administration et du secteur public
Enfin, le CSLF insiste fortement sur le rôle moteur que doit jouer l’Administration dans la promotion du français comme langue commune au Québec. Dans cet esprit, il est indispensable que l’État, dans toutes ses composantes, agisse de manière exemplaire en respectant l’ensemble des éléments de la politique linguistique qui le concernent. Dans cet esprit, le CSLF recommande au gouvernement d’appliquer résolument toute mesure visant à accroître l’insertion de travailleurs allophones et anglophones dans le secteur public et à leur proposer du soutien linguistique au besoin.
La politique linguistique, toujours nécessaire!
Plus de 35 ans après l’adoption de la Charte de la langue française, le CSLF estime qu’il est important de souligner les progrès accomplis depuis la mise en place de la politique linguistique, notamment dans le monde du travail, ce qui a permis l’élimination quasi complète des inégalités socioéconomiques entre francophones et anglophones. De même, l’apprentissage du français et la formation en français, que ce soit par la scolarisation obligatoire, par les études supérieures ou bien par la francisation, rejoignent une majorité de plus en plus grande de Québécois.
Le CSLF soutient cependant que ces acquis fondamentaux ne doivent pas masquer les problèmes touchant la bonne maîtrise du français par l’ensemble des Québécois, peu importe leur langue maternelle. Ils ne doivent pas non plus faire oublier l’ampleur considérable de la tâche que constitue la francisation de milliers d’immigrants chaque année, et ce, dans un contexte où la proportion de personnes ayant le français comme langue maternelle ou langue d’usage à la maison est en diminution, particulièrement dans la région de Montréal. De plus, bien qu’elle se soit globalement améliorée depuis les années 1970, la situation du français comme langue du travail demeure une source de préoccupation. Comme le précise le président du CSLF, monsieur Robert Vézina, « le chantier n’est pas terminé. Le contexte a changé et de nouveaux défis se présentent. Plusieurs travaux doivent être poursuivis avec une ardeur renouvelée, dont celui de redynamiser la politique linguistique du Québec. Il importe de réaffirmer la place centrale du français au cœur de nos ambitions collectives et d’insister sur les avantages que confère aux Québécois l’usage d’une langue commune telle que le français, une langue au rayonnement international. »
Pour en apprendre davantage, nous vous invitons à consulter l’avis Redynamiser la politique linguistique du Québec ou ses faits saillants accessibles dans la section Avis de la Bibliothèque virtuelle du site Web du CSLF.